De la nécessité d’une formation citoyenne
Depuis plus d’une décennie, la Côte d’Ivoire est en proie à des convulsions socio-politiques qui ont non seulement retardé son développement économique mais porté gravement atteinte aux droits humains, dont parfois les plus élémentaires. Les graves violations de ces droits de l’homme et manquements à la bonne gouvernance sont pour la plupart liés à des réflexes tribalistes dus au peu d’enseignement sur ce que devrait représenter, pour chacun, la nation et la république. Après les graves évènements de la crise post-électorale, le jeu démocratique s’est grippé en Côte d’Ivoire. La liberté d’expression s’exerce difficilement du fait de l’absence de confiance entre le pouvoir et l’opposition. La politique de répression a créé au sein de la population, proche de la gauche démocratique ou perçue comme telle, une véritable peur. De nombreuses organisations de défense des droits de l’homme se sont faites l’écho d’une telle situation. Le rapport d’Amnesty International[i], publié en février 2013, dénonce la dure «loi des vainqueurs». Ce rapport met au grand jour les abus, tortures et assassinats ciblés sur les pro-Gbagbo ou toutes les personnes soupçonnées de sympathie avec lui ou de sympathie avec les formations politiques de l’Opposition non encadrée.
En Côte d’Ivoire, peu de formations politiques ont fait de l’éducation civique une priorité alors que la Constitution Ivoirienne, en son article 14 stipule que «les Partis et Groupements politiques concourent à la formation de la volonté du peuple et à l’expression du suffrage».
Soucieuse d’apporter sa contribution à la réduction de ce grave déficit d’éducation citoyenne, l’Alliance Ivoirienne pour la République et la Démocratie (AIRD) veut saisir toutes les opportunités pour fournir aux plus jeunes les ingrédients d’une vie citoyenne harmonieuse entre tous.
Former la jeunesse à la citoyenneté pour garantir la paix et l’avenir
C’est d’ailleurs ce qui a conduit à l’adoption du concept de Cellule de Réflexion Citoyenne (CRC). Ce concept de CRC répond, en effet, au besoin pour les citoyens de se créer des cadres de concertation en vue d’échanger des expériences ou des connaissances sur les questions de développement économique, social et humain à travers la comparaison de divers systèmes possibles et l’adoption des mieux appropriées à la spécificité ivoirienne et africaine.
À l’instar de ce programme qui ambitionne d’initier librement tous les citoyens, et notamment les jeunes, à la formation politique, à l’esprit civil, à la démocratie, à l’auto-emploi, etc, nous espérons avec ces notions de base donner à nos lecteurs les fondements d’une saine participation à la vie politique du pays.
Le manque de formation politique et citoyenne a été une des plus importantes causes de l’instrumentalisation des différences, notamment ethniques, religieuses et sociales pour assouvir bien souvent des ambitions personnelles. Dans bien des cas, c’est le peu de culture politique qui a été un bon terreau pour les projets de division des Ivoiriens. Outre la formation citoyenne, les CRC sensibilisent à l’esprit d’entreprise et à la lutte contre la pauvreté. Une pauvreté, source de bien de maux des sociétés africaines désormais confrontées aux violences urbaines et rurale. Avec plus de 7 millions de chômeurs sur une population d’une vingtaine de millions d’habitants, le chômage a atteint, en Côte d’Ivoire, des proportions dangereuses pour sa stabilité politique.
La mise en place des CRC (Cellule de Réflexion Citoyenne) à travers Abidjan, les villes et villages de l’intérieur du pays, partout où les conditions le permettent et où la volonté existe, est donc un ambitieux projet que complètera le volet formation de base via ce site.
Parmi les objectifs prioritaires des projets de l’Alliance Ivoirienne pour la République et la Démocratie (AIRD), figurent en bonne place :
- Aider les esprits à la réconciliation nationale par une formation citoyenne des Ivoiriens ;
- Vaincre en chaque citoyen la peur du prochain et le dégoût de la politique du fait que cette dernière est progressivement devenue un champ de la violence et de la haine ;
- Promouvoir l’auto-emploi au sein de la jeunesse ivoirienne pour son insertion sociale et la détourner ainsi de la violence.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme
[i] Selon Amnesty International, dans son rapport publié en février 2013, «Près de deux ans après la fin de la crise post-électorale qui a fait près de 3 000 morts, la Côte d’Ivoire demeure le théâtre de violations graves des droits humains à l’encontre de partisans avérés ou supposés de l’ancien président Laurent Gbagbo. Ces violations ont été commises en réponse à une multiplication d’attaques armées contre des objectifs militaires et stratégiques qui ont créé un climat d’insécurité généralisée.
Les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI, armée nationale) et la police militaire se sont rendues responsables de nombreuses violations des droits humains en arrêtant et détenant des individus en dehors de tout cadre légal sur des bases souvent ethniques et politiques. Ces exactions ont été rendues possibles par la prolifération de lieux de détention non reconnus comme tels où des individus soupçonnés de tentative d’atteinte à la sûreté de l’État ont été détenus au secret, parfois pendant de longues périodes et dans des conditions inhumaines et dégradantes. Beaucoup ont été torturés et certains ont été remis en liberté contre le paiement de rançons.
Amnesty International est extrêmement préoccupée par ce non-respect des garanties essentielles en matière de protection des détenus et par le fait que l’ensemble de la procédure judiciaire semble contraire aux normes fondamentales du droit international et de la législation ivoirienne (refus d’accès à un avocat, procès-verbaux falsifiés et dictés par les militaires responsables des interrogatoires et surtout « aveux » extorqués sous la torture).
Au-delà de la capitale économique, Abidjan, et des grandes villes du sud du pays, ce climat général de tension est particulièrement perceptible dans l’ouest de la Côte d’Ivoire qui demeure miné par des dissensions ethniques alimentées par des conflits fonciers. Cette région, la plus meurtrie par la décennie d’instabilité qu’a connue le pays, a une nouvelle fois été le théâtre de violences lors de l’attaque, en juillet 2012, du dernier camp de personnes déplacées situé à Nahibly, à proximité de la ville de Duékoué (à 450 km d’Abidjan). Cette attaque a été perpétrée par des populations locales soutenues par des Dozos, une milice de chasseurs traditionnels soutenue par l’État et par l’armée. De nombreux témoignages recueillis par Amnesty International font état d’arrestations, de disparitions forcées, d’exécutions extrajudiciaires et d’une volonté des assaillants de raser ce camp de personnes déplacées.
À la connaissance d’Amnesty International, aucun des auteurs des violations et atteintes très graves aux droits humains décrites dans le présent rapport n’a été traduit en justice ni même relevé de ses fonctions. Cela illustre l’échec des autorités ivoiriennes à instaurer un état de droit près de deux ans après l’arrivée au pouvoir des nouvelles autorités.
Loin de répondre aux espoirs d’une justice impartiale, les autorités ont exclusivement ciblé les partisans avérés ou présumés de l’ancien président Laurent Gbagbo et ont amorcé à leur encontre des procédures judiciaires dilatoires qui ne respectent pas les normes internationales d’équité. En effet, près de deux ans après l’arrestation de ces personnes, l’argument de la lenteur nécessaire pour le bon exercice de la justice ne tient plus. Toutes les informations recueillies par Amnesty International indiquent que l’instruction est faite uniquement à charge sans qu’il y ait eu, à ce jour (février 2013), ni confrontation avec des victimes ni aucun élément de preuve matériel communiqué à la défense.
La multiplication des arrestations arbitraires, la permanence de la torture, la toute-puissance des forces armées, la logique de vengeance et la perpétuation de l’impunité nourrissent les divisions et les rancœurs, ralentissent l’instauration d’un véritable état de droit et minent le processus de réconciliation amorcé par la Commission dialogue, vérité et réconciliation mise en place en juillet 2011»
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